La déferlante des smartphones chinois fait vaciller Samsung

décembre 18, 2014
admin

Trois des cinq premiers fabricants mondiaux de smartphones viennent de Chine. Huawei, Xiaomi et Lenovo fondent sur Samsung et Apple.

L’époque où la Chine était réduite à son rôle d’usine des grands fabricants de smartphones est bel et bien révolue. Entre juin et septembre, trois des cinq plus gros acteurs du marché étaient chinois,selon les chiffres que vient de publier l’institut Gartner. Une première, qui change la donne dans le secteur.

Derrière Samsung et Apple, qui se partagent les deux premières places du marché depuis plus de trois ans, les trois chinois Huawei, Xiaomi et Lenovo chassent en meute. Ils ont vendu 46 millions de smartphones en trois mois, un peu plus de 15 millions chacun. Cela représente une hausse de près de 65 % en un an, et vingt points de plus que la croissance du marché.

Ces sociétés ne se contentent pas d’attirer de nouveaux clients. Elles en subtilisent aussi à leurs concurrents. Désormais, les trois fabricants chinois totalisent 15,5 % du marché mondial des smartphones, alors qu’ils n’existaient guère il y a trois ans. Leur première victime est Samsung. La part de marché du sud-coréen a fondu en un an, passant de 32 % à 24 %. Son compatriote LG, qui avait réalisé une bonne année 2013, est exclu du top 5. Apple se maintient, grâce à l’iPhone 6, mais est bien seul pour contrebalancer cette hausse.

Les fabricants chinois ont commencé par faire le ménage sur leurs terres. Les ventes de Samsung ont dégringolé de 28 % en Chine, son plus important marché, où Xiaomi l’a supplanté en moins d’un an. Le jeune numéro un chinois, dont les ventes ont quintuplé, fait un tabac avec le M4, un smartphone de qualité vendu l’équivalent de 250 euros, deux fois moins cher qu’un Samsung Galaxy S5. Il siphonne aussi le marché avec des smartphones vendus autour de 80 euros. En phase de conquête, Xiaomi n’a dégagé une marge opérationnelle que de 1,8 % en 2013, bien loin des 18,7 % de la division mobile de Samsung Electronics.

Comme Xiaomi, Lenovo et Huawei réalisent leurs plus fortes ventes en Chine, où près d’un smartphone sur trois est vendu dans le monde, selon l’institut Canalys. Cela leur donne une bonne assise pour se développer dans les marchés environnants, notamment à Taïwan, à Singapour et en Malaisie. Certains disposent de bonnes parts de marché en Russie et dans les pays d’Europe de l’Est.

«C’est du vol»

Leur expansion reste toutefois freinée par plusieurs obstacles. L’image des marques chinoises souffre toujours de la comparaison avec Apple et Samsung. Afin de combler ce déficit d’image et d’accélérer sa croissance, Lenovo a bouclé en octobre l’acquisition des mobiles de Motorola pour 2,9 milliards de dollars (2,3 milliards d’euros). Huawei, qui s’est fixé pour objectif de devenir numéro un mondial, se fait connaître par le sponsoring. Il a signé pour trois ans un partenariat afin de devenir le smartphone officiel du club Paris Saint-Germain. D’autres chinois choisissent de créer des filiales en Occident pour attaquer ces marchés plus sous un autre nom. C’est le cas de Tinno, qui détient la marque française Wiko.

La croissance à tous crins de ces sociétés chinoises se fait aussi parfois en testant les limites de la propriété intellectuelle. En octobre, Jonathan Ive, designer vedette d’Apple, s’en est vertement pris à Xiaomi, qu’il a accusé de plagier ses produits. La proximité entre le design du M4 et l’iPhone 5s est en effet troublante. «Je n’y vois pas une forme de flatterie, mais du vol», a-t-il accusé. «Vous ne pouvez juger nos produits qu’après les avoir utilisés», lui a rétorqué le cofondateur et président de Xiaomi, Lin Bin. Hors de ses terres, le fabricant chinois s’expose à des poursuites. Ericsson vient de lancer une action en justice contre lui en Inde, pour violation de brevets. Cela a conduit à une interdiction partielle des ventes de ses produits, décidée par un tribunal indien mardi.

La percée des marques chinoises montre que le marché des smartphones reste dynamique, et que les positions, huit ans après la sortie du premier iPhone, ne sont pas figées. Il devrait se vendre 1,2 milliard de smartphones en 2014, contre 967 millions en 2013, soit une nouvelle hausse de près de 25 %, selon Gartner.